• J'aime les poèmes des autres... "Elle n'est pas morte"

    Elle n'est pas morte  
     
     
    On l’a tuée à coups de chassepot,
    À coups de mitrailleuse
    Et roulée avec son drapeau
    Dans la terre argileuse.
    Et la tourbe des bourreaux gras
    Se croyait la plus forte.
     
    Refrain
    Tout ça n’empêche pas Nicolas
    Qu’ la Commune n’est pas morte.
    Tout ça n’empêche pas Nicolas
    Qu’ la Commune n’est pas morte !
     
    Comme faucheurs rasant un pré,
    Comme on abat des pommes,
    Les Versaillais ont massacré
    Pour le moins cent mille hommes.
    Et les cent mille assassinats,
    Voyez ce que ça rapporte.
     
    On a bien fusillé Varlin,
    Flourens, Duval, Millière,
    Ferré, Rigault, Tony Moilin,
    Gavé le cimetière.
    On croyait lui couper les bras
    Et lui vider l’aorte.
     
    Ils ont fait acte de bandits,
    Comptant sur le silence.
    Achevez les blessés dans leur lit,
    Dans leur lit d’ambulance
    Et le sang inondant les draps
    Ruisselait sous la porte.
     
    Les journalistes policiers,
    Marchands de calomnies,
    Ont répandu sur nos charniers
    Leurs flots d’ignominie.
    Les Maxim’ Ducamp, les Dumas
    Ont vomi leur eau-forte.
     
    C’est la hache de Damoclès
    Qui plane sur leurs têtes.
    À l’enterrement de Vallès,
    Ils en étaient tout bêtes
    Fait est qu’on était un fier tas
    À lui servir d’escorte
     
    C’ qui prouve en tous cas Nicolas,
    Qu’la Commune n’est pas morte.
    C’ qui prouve en tous cas Nicolas,
    Qu’la Commune n’est pas morte !
     
    Bref tout ça prouve au combattant
    Qu’ Marianne a la peau brune,
    Du chien dans l’ ventre et qu’il est temps
    D’crier vive la Commune !
    Et ça prouve à tous les Judas
    Qu’si ça marche de la sorte
     
    Ils sentiront dans peu nom de Dieu,
    Qu’la Commune n’est pas morte.
    Ils sentiront dans peu nom de Dieu,
    Qu’la Commune n’est pas morte !

     

    Pourquoi Eugène Pottier, pourquoi la Commune ?
     
    Mon humeur d'aujourd'hui n'est pas manifestation nostalgique de ce passé déjà lointain qui fut le mien sous d'autres cieux politiques...
    Mais on retrouve des textes, on relit une page d'Histoire, on revoit un film...
     
    Il y a des textes qui ont de la gueule.
    Il y a des airs de musique qui ont de la moustache, comme disait l'autre (mais moi je ne pense pas à la Marseillaise), il y a des poètes qui ont cru et qui n'ont pas fait semblant...
    Je sais bien que Pottier commettra l'année suivante l'Internationale mais il s'agit ici de la Commune de 1871...
    Je pense que ce fut bien autre chose que la Province contre Paris, ce fut un mouvement révolutionnaire un sursaut désespéré devant la trahison, désespéré peut-être mais profondément nationaliste et populaire.
    Je sais bien, d’autres ont déjà soutenu semblable hypothèse…
    Je sais bien : il y a eu les exécutions d'otages, il y a eu les pillages, les incendies, la destruction de monuments,
    Il y a eu surtout la récupération par les doctrinaires qui ont réécrit cette page d'Histoire.
    Je sais bien que la plupart des grands noms de la littérature, de la poésie et de la critique... Flaubert, Alphonse Daudet, Dumas fils, George Sand, Francisque Sarcey, Maxime du Camp, Hérédia, Leconte de Lisle, Théophile Gautier,Taine, Renan, Anatole France et tant d'autres ont réagi violemment contre les insurgés et souvent encouragé la répression la plus féroce... Zola, écoeuré par toutes les tueries, a gardé ses distances ("Le bain de sang que le peuple de Paris vient de prendre était peut-être une horrible nécessité pour calmer certaines de ses fièvres."), Verlaine s'éloignera  et Victor Hugo lui-même n'a pas admis cette révolte (il aidera ensuite les bannis et protègera les persécutés). Dans le monde littéraire, il n'y eut guère que Rimbaud (et Vallès, bien sûr) à proclamer leur soutien aux Communards.
    Les installés, les nantis ont regardé ailleurs, ils ont clamé leur dégoût, la peur du peuple et leur égoïsme.
    Il n'est pas question d'aimer...
    Mais on ne peut vraiment les rejeter, ces grands bourgeois dont certains sont d'immenses écrivains, il faut comprendre. Ils ont disparu et si leurs écrits vivent encore, l'humanité leur doit le respect.
    Aujourd'hui, on ne peut admirer l'oeuvre de Louis-Ferdinand Céline et séparer cette oeuvre de l'homme qu'il fut.
     
    J'ai évoqué le cinéma. Pour moi, la Chanson de Pottier, qui le termine, est inséparable du magnifique film de Tavernier "Le Juge et l'Assassin" dans lequel l'ami Michel Galabru interpréta le meilleur rôle de sa carrière : un dément sanguinaire (vrai ou simulateur, c'est la clé de l'histoire ), cruel et particulièrement dévot, "l'Anarchiste de Dieu", piégé par une certaine justice. Une justice acharnée, obstinée à démontrer que le "peuple, c'est la canaille"...
     
    Ces quelques réflexions amèneront des réflexions. Elles n'ont certainement pas grand-chose d'original... Syncrétisme simpliste, oecuménisme de fort mauvais aloi...
     
    D'autres, beaucoup plus distingués s'écriront : putain, le sale con, les bourreaux et les assassins dans le même panier... !!!
     
    J'ai déjà célébré, ensemble, Robert Brasillach et Federico Garcia Lorca... et déploré leur mort injuste...
     
    Je sais que je ne contenterai personne mais ce n'est, bien évidemment, pas mon but...
    Alors, un coup de pied au cul de plus ou de moins...
     
    Ces réflexions n'ont pas grande utilité sinon celle de me permettre d'exorciser quelques vieux démons... comme on dit dans la série rose...
    Romantisme de pacotille… moi j’aime de temps en temps.


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