• Je fouillais récemment dans mes «  archives »…

    Je ne cherchais rien de précis…
    une soudaine envie de mettre un peu d’ordre et de me débarrasser de papiers et de menus objets inutiles.
    un vœu pieux… une simple velléité car au moment de jeter,  j’hésite toujours et le plus souvent je garde !
    Je suis tombé sur  quelques diplômes anciens…
    Je  fus soudain attendri par ces documents vivement colorés, aux dimensions impressionnantes.
    Hélas, les miens, ceux que j’avais gagné de haute lutte, avaient disparu… il ne restait qu’un embryon de collection… des  diplômes délivrés à des inconnus.
    Mais ces objets m’ont fait rêver…
    Les diplômes !
    Mieux que les cadeaux ou les jours de fête… ils font partie des meilleurs  souvenirs de ma jeunesse.
    Non pas les objets eux-mêmes… (encore que certains de ces parchemins soient assez  beaux), mais les circonstances de leur obtention…
    Ils représentaient un plaisir fait de fierté mais aussi de la joie de mes parents.
    Je me mis à rechercher le plus vieux de ces documents… et de préférence un de ceux qui récompensait un examen auquel j’avais moi-même été admis.
    Et je trouvai.
    Un diplôme du Certificat d’Etudes Primaires… et coïncidence,  il s’agissait du CEP de l’Enseignement Libre (ou privé ou confessionnel, comme vous voudrez, la guéguerre entre les deux écoles était encore vive)…



    Le CEPL, le plus ancien de ceux  qui me firent gravir les premiers échelons de la vie scolaire (qui, je ne le savais pas encore, ne prendrait fin en réalité que bien des décennies plus tard…) examen auquel on se présentait à la fin de la sixième, vers l’âge de 11 ou 12 ans…
    Deux ou trois ans plus tard il fallait passer le « vrai » Certificat, l’officiel, celui de l’école laïque.
    Ce document me fit revenir en arrière de beaucoup plus d’un demi-siècle…
    Je revoyais la vieille école des Frères des Ecoles Chrétiennes, l’institution  Saint Jean-Baptiste de la Salle, celle tenue par les Frères (non prêtres) au rabat blanc, à la cape bizarre aux manches cousues qui les avait fait surnommer les Frères Quatre-Bras…





    Il me semble revivre cette journée mémorable et glorieuse, presque minute par minute.
    C’était mon premier véritable examen…
    Les épreuves se déroulaient dans le collège même et les résultats étaient proclamés peu de temps après la fin des épreuves.
    Tout s’était très bien passé et je n’éprouvais pas une grande inquiétude.
    Beaucoup d’impatience  et malgré tout une petite anxiété…
    Les résultats furent conformes à mon attente et le directeur nous précisa que les diplômes seraient remis le lendemain dans l’établissement.
    Pour moi, il n’était pas question de rentrer à la maison familiale sans le diplôme !
    Mon cousin était interne et ses parents venaient le chercher.
    Il se présenta  devant moi muni du précieux document !
    Je décidai d’aller voir le directeur pour obtenir le mien immédiatement…
    La "négociation" ne fut pas facile. Le haut personnage écouta gentiment mes arguments plutôt confus…  que je dus accompagner d’un léger mensonge du genre «  je ne pourrai pas venir au collège demain car je dois aller avec mes parents à… »). Le directeur ne fut pas dupe, son demi-sourire le montrait bien mais, étant donné que j’étais  bon élève, il m’accorda cette faveur.
    Ô joie !
    Il me restait à me rendre au bureau du Frère Econome-Procureur-Intendant-Secrétaire… je ne me souviens plus guère de ses titres exacts ni de ses multiples fonctions.
    C'était un très vieil homme tremblotant, à la voix chevrotante, portant une bizarre calotte cylindrique qui prit un diplôme vierge, prépara ses porte-plume, ses encriers et ses tampons et commença enfin à écrire…
    Je craignais que son écriture soit fort maladroite mais à mon grand étonnement, dès qu’il saisit le porte-plume sa main devint ferme et il calligraphia mes nom, prénoms… sans la moindre hésitation.
    Ce fut magnifique !
    mais, Dieu, que c’était lent !
    Je me serais évidemment contenté de quelque chose de plus simple…
    Je bouillais !
    Enfin le beau diplôme me fut remis.
    L’instant délicieux...
    Il fallut le signer… ce fut certainement ma première véritable signature… un vague gribouillis que je passerai une bonne partie de ma vie à essayer d’améliorer… sans parvenir à quelque chose qui  puisse vraiment me satisfaire.
    Je rentrai chez moi, le document roulé dans un long tube de carton, cadeau du vieil homme qui avait remarqué mon impatience et s’en était amusé…
    La joie, la fierté de mes parents me firent certes plaisir mais n’ajoutèrent pas grand-chose au grand moment que je venais de vivre…
    C’était vraiment peu, une simple étape... d’autres examens, d’autres  réussites (et bien des échecs) devaient suivre mais je ne retrouvai jamais l’émotion qui m’avait saisi  ce jour-là.




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